Evandre

Lecture cursive de textes latins et grecs

55 58 Rapports du corps et de l'âme

Le corps au service de l'âme



Tusc. II 55-58: Rapports du corps et de l'âme


Texte latin:


55 Et, si verum quaerimus, in omnibus officiis persequendis animi est adhibenda contentio ; ea est sola offici tamquam custodia. Sed hoc idem in dolore maxime est providendum, ne quid abjecte, ne quid timide, ne quid ignave, ne quid serviliter muliebriterve faciamus, in primisque refutetur ac rejiciatur Philocteteus ille clamor. Ingemescere non numquam viro concessum est, idque raro, ejulatus ne mulieri quidem. Et hic nimirum est " lessus ", quem duodecim tabulae in funeribus adhiberi vetuerunt. 56 Nec vero umquam ne ingemescit quidem vir fortis ac sapiens, nisi forte ut se intendat ad firmitatem, ut in stadio cursores exclamant quam maxime possunt. Faciunt idem, cum exercentur, athletae, pugiles vero, etiam cum feriunt adversarium, in jactandis caestibus ingemescunt, non quod doleant animove succumbant, sed quia profundenda voce omne corpus intenditur venitque plaga vehementior.

XXIV Quid ? qui volunt exclamare majus, num satis habent latera, fauces, linguam intendere, e quibus elici vocem et fundi videmus ? Toto corpore atque omnibus ungulis, ut dicitur, contentioni vocis adserviunt. 57 Genu mehercule M. Antonium vidi, cum contente pro se ipse lege Varia diceret, terram tangere. Ut enim balistae lapidum et reliqua tormenta telorum eo graviores emissiones habent, quo sunt contenta atque adducta vehementius, sic vox, sic cursus, sic plaga hoc gravior, quo est missa contentius. Cujus contentionis cum tanta vis sit, si gemitus in dolore ad confirmandum animum valebit, utemur ; sin erit ille gemitus elamentabilis, si inbecillus, si abjectus, si flebilis, ei qui se dederit vix eum virum dixerim. Qui quidem gemitus si levationis aliquid adferret, tamen videremus, quid esset fortis et animosi viri ; cum vero nihil imminuat doloris, cur frustra turpes esse volumus ? Quid est enim fletu muliebri viro turpius ? 58 Atque hoc praeceptum, quod de dolore datur, patet latius. Omnibus enim rebus, non solum dolori, simili contentione animi resistendum est. Ira exardescit, libido concitatur; in eamdem arcem coufugiendum est, eadem sunt arma sumenda. Sed quoniam de dolore loquimur, illa omittamus.


Vocabulaire :

Fréquences 1,2 :

concito,as,are : agiter,exciter, éveiller

contentus,a,um : content de, satisfait

fauces, ium : la gorge

forte adv : par hasard

fundo,is,ere : verser, répandre, produire

ira,ae : colère

jacto,as,are : jeter, agiter

latus,eris : côté, flanc

libido,inis : désir, envie

mitto,is,ere : envoyer

nisi : si ne pas, sauf

quam + sup. : le + possible

quoniam : puisque

solus,a,um : seul

superior,oris : supérieur, vainqueur

-ve : ou bien


Fréquences 3,4 :

adversarius,a,um : adversaire, rival

arx,arcis : citadelle

confirmo,as,are : affermir,prouver

frustra : en vain

funus,eris : funérailles, mort, deuil

genu, us : genou

lapis,idis : pierre

lingua,ae : langue

maxime : surtout

omitto,is,ere : laisser aller

persequor,eris,i : suivre de bout en bout, poursuivre, exposer

plaga, ae : coup, blessure

praeceptum, i : précepte, règle, injonction

provideo,es,ere : prévoir, pourvoir à

raro (adv.) : rarement

sin : mais si

timidus,a, um : craintif

tormentum,i : catapulte, torture


ne pas apprendre :

animosus,a,um : valeureux

athleta,ae : athlète

caestus,us : ceste, gantelet

confugio,is,ere : se réfugier

cursor, oris : le coureur

duodecim : douze

ejulatus, us : lamentation

emissio, onis : le lancer, le jet

exardesco,is,ere : s'allumer, s'embraser

firmitas,atis : solidité

flebilis, is, e : lamentable, déplorable

ignave : lâchement

imminuo,is,ere : diminuer

inbecillus,a,um : faible

mehercule : par hercule

muliebris,is,e : de femme

muliebriter : à la façon d'une femme

nimirum : certainement, sans doute

pugil,ilis : pugiliste

refuto,as,are : refuser

rejicio,is,ere : rejeter

serviliter : à la façon d'un esclave

stadium,ii : stade

timide : craintivement

vehemens,entis : énergique, violent


Traduction au plus près du texte :


55 Et, si nous recherchons le vrai, <c’est> dans l’accomplissement de tous les devoirs <qu’> il faut employer la tension de l’âme ; celle-ci est pour ainsi dire (tamquam) la seule garde du devoir. Mais il faut veiller à cette même chose (hoc idem providendum est) surtout dans la douleur, <c’est-à-dire> à ce que nous ne fassions rien sans courage, rien avec peur, rien lâchement, rien à la façon d’un esclave ou d’une femme, et surtout à ce que soit refusée et rejetée ce cri de Philoctète (ille = dont j’ai parlé tout à l’heure). Gémir, parfois, est permis à un homme digne de ce nom, et cela rarement, mais (asyndète) les cris <ne sont jamais permis>, pas même à une femme. Et c’est sans doute (nimirum) ce « lessus » que les douze tables ont interdit d’employer dans les funérailles.


56 Mais jamais l’homme courageux et sage ne pousse même un gémissement, sinon peut-être pour qu’il se mette en tension en vue de la fermeté, comme dans un stade des coureurs crient le plus qu’ils peuvent. Ils font la même chose, lorsqu’ils s’entraînent, les athlètes ; et (vero) les pugilistes, même lorsqu’ils frappent leur adversaire, poussent des gémissements dans l’élan de leurs cestes (= en jetant leurs mains gantées en avant) , non parce qu’ils souffriraient ou fléchiraient dans leur courage, mais parce que, en faisant sortir un cri, tout le corps se met en tension et que le coup arrive, bien plus violent. Quoi ? ceux qui veulent crier assez fort, est-ce que par hasard il leur suffit de mettre en tension leurs flancs, leur gorge, leur langue, à partir desquels nous voyons le cri être lancé et émis ? <non>, avec leur corps tout entier et de toutes leurs griffes, comme on dit, ils s’asservissent à la tension (l’intensité) de leur cri.


57 Par Hercule c’est avec le genou que j’ai vu Marc Antoine, alors qu’en tension maximum (contente) il plaidait lui-même pour lui-même à cause de la loi Varia, toucher la terre. En effet, de même que les balistes et les autres machines (tormenta) ont des lancers (emissiones) de pierres et de flèches d’autant plus puissants qu’ (eo graviores quo) elles ont été plus violemment mises en tension et remontées (comme un réveil ! ! !), de même le cri, de même la course, de même le coup sont d’autant plus puissants (hoc = adv.= eo gravior quo) qu’ils sont émis

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