Evandre

Lecture cursive de textes latins et grecs

w exercices et travaux

préparation à l'examen



Pistes pour expliquer un extrait du Criton :


Date de composition du dialogue : vers l’année 387… : moment de l’écriture

Date de la mort de Socrate : juin 399 : moment de l’histoire.

Platon , présent au procès de Socrate (mi-mai 399) était malade le jour de l’exécution, et n’y assista pas.

Criton : Athénien riche ; vieil ami de Socrate ; a à peu près 70 ans comme lui ; né dans le même dème (circonscription administrative) ; a confié ses enfants à Socrate pour leur éducation philosophique (notamment son fils Critobule). Fermera les yeux et la bouche de Socrate après sa mort.


Le Criton est un dialogue, donc :

  • installe un moment et un cadre ; → rôle des adverbes de lieu et de temps, des rapports entre l’intérieur (la prison) et l’extérieur (Athènes), la patrie et l’étranger, le présent et l’avenir (pour Criton et ses amis, pour les enfants de Socrate), le présent et le passé (pour Socrate, et la cohérence de sa pensée) ; le monde d’ici-bas et l’au-delà, également.

  • installe des personnages dont les paroles révèlent le caractère, les préoccupations, les soucis ; sérénité de Socrate, angoisse de Criton, majesté des Lois. → rôle du lexique, et de la ponctuation ; rôle des caractérisations des personnages (dans les interpellations notamment)

  • installe un enjeu dramatique, et , ici, tragique ; la mort, pour Socrate, et la survie après la mort du maître ou du père , pour les compagnons, disciples et fils. → rôle des champs lexicaux (la fin, la mort…) qui, selon la brutalité ou la délicatesse des termes employés, vont déterminer les intentions des personnages les uns vis-à-vis des autres (délicatesse inquiète de Criton ; rudesse enjouée de Socrate), et leur position vis-à-vis du sujet (tension de Criton, distanciation de Socrate)


Le Criton est un texte philosophique (même s’il fait partie des dialogues dits « de jeunesse » de Platon), donc :

  • porte un sous-titre : « Sur le devoir, genre éthique » qui doit guider la réflexion : il s’agit d’une réflexion morale sur la conduite à tenir, pour un homme, au milieu d’autres hommes ; pour un individu, au milieu d’une société ; il y a donc passage constant du cas particulier à l’universel, souci de généralisation. → rôle des temps verbaux (passage au présent de généralité), des formules impersonnelles généralisantes (verbes : il faut, on doit…), du lexique abstrait (la Loi, la Cité, la Justice, le Droit etc…)

  • est un texte argumentatif : il définit des thèses (proposée, rejetée) qu’il faut clairement mettre en évidence ; il utilise des articulations logiques (cause, conséquence, opposition) à repérer et à exploiter ; il se sert de comparaisons, de citations, et de divers procédés de persuasion (la prosopopée…) dont il convient d’envisager l’impact.

  • est un texte platonicien : donc une réflexion permanente sur l’opinion (δόξα, δοκεῖν), sur le rôle et le pouvoir du grand nombre (οἱ πολλοί) mais aussi sur l’autorité de la loi,sur l’enracinement religieux de la morale (σεμνός, σέβεσθαι, ἅγιος, ὅσιος), sur l’après-vie et la responsabilité.

  • Est un texte destiné à une postérité : il instaure le primat de la raison sur l’émotion pour guider la conduite humaine, et est à l’origine de notre rationalisme ; il soumet l’harmonie sociale à la « dictature » de la Loi, qui n’apparaît toutefois pas, comme elle le sera plus tard chez Rousseau, comme le résultat d’un Contrat Social (attention aux anachronisme).


Contrôle de lecture

PLATON : CRITON

A) 10 points

Qu’est-ce que le « navire de Délos » ? Quel événement mythique commémore-t-il ? (5 lignes)

Quels sont les deux personnages du dialogue ? Caractérisez-les rapidement (2 lignes)

Qu’est-ce qu’une prosopopée ? (2 lignes )

B) 10 points

Combien de parties avez-vous repéré dans ce dialogue ? Justifiez votre découpage. (5 à 10 lignes)

C) 20 points

A l’aide des mots outils de la liste qui suit, que vous citerez en grec :

Définissez l’objectif de Criton, et l’essentiel de son argumentation ;

Exposez la position de Socrate (20 lignes maximum)


ὁ ἐπιτήδειος, ὁ φίλος

τὰ χρήματα

ἡ φυγή

οἱ ὑεῖς

ἡ δόξα

ἡ ἀρετή

σκέπτομαι

ὁ λογός

πράττειν / λέγειν

ἡ πόλις / ὁ νόμος

ἡ ἀλήθεια

ὁ θάνατος / ὁ βίος

ἡ δικαιοσύνη / ἡ ἀδικία

le compagnon, l’ami

les richesses

la fuite, l’exil

les fils

la réputation, l’opinion

la vertu

examiner

le discours, la raison

faire / dire

la cité / la loi

la vérité

la mort / la vie

la justice / l’injustice


Préparation au baccalauréat : Un grand philosophe : Platon (50c-51c)


Texte grec :

Criton a proposé à Socrate, condamné à mort à l'issue de son procès, de s'enfuir grâce à l'aide de ses amis, et de s'installer ailleurs. Socrate lui répond par une prosopopée : les Lois se dressent devant lui et lui montrent que son évasion ruinerait la légalité, et donc la cité. Dans ce dialogue imaginaire, Socrate et Criton viennent de répliquer aux Lois : "La cité a commis contre nous une injustice et le jugement qu'elle a posé va contre le bon droit".

< Les "blancs" délimitent le texte de la version à traduire. Les questions portent sur l'ensemble du texte.>

1




5






10





15






20





25





30





35




39

ΣΩΚΡΑΤΗΣ

Τί οὖν, ἂν εἴπωσιν οἱ νόμοι ·

- Ὦ Σώκρατες, ἦ καὶ ταῦτα ὡμολόγητο ἡμῖν τε καὶ σοί, ἢ ἐμμένειν ταῖς δίκαις αἷς ἂν ἡ πόλις δικάζῃ ;

Εἰ οὖν αὐτῶν θαυμάζοιμεν λεγόντων, ἴσως ἂν εἴποιεν ὅτι ·

- Ὦ Σώκρατες, μὴ θαύμαζε τὰ λεγόμενα, ἀλλ ΄ ἀποκρίνου, ἐπειδὴ καὶ εἴωθας χρῆσθαι τῷ ἐρωτᾶν τε καὶ ἀποκρίνεσθαι.


- Φέρε γάρ, τί ἐγκαλῶν ἡμῖν καὶ τῇ πόλει ἐπιχειρεῖς ἡμᾶς ἀπολλύναι ; Οὐ πρῶτον μέν σε ἐγεννήσαμεν ἡμεῖς καὶ δι ΄ ἡμῶν ἐλάμβανεν τὴν μητέρα σου ὁ πατὴρ καὶ ἐφύτευσέν σε ; Φράσον οὖν , τούτοις ἡμῶν τοῖς νόμοις τοῖς περὶ τοὺς γάμους μέμφῃ τι ὡς οὐ καλῶς ἔχουσιν ;

- Οὐ μέμφομαι, φαίην ἄν.

- Ἀλλὰ τοῖς περὶ τὴν τοῦ γενομένου τροφήν τε καὶ παιδείαν ἐν ᾗ καὶ σὺ ἐπαιδεύθης; ἢ οὐ καλῶς προσέταττον ἡμῶν οἱ ἐπὶ τούτῳ τεταγμένοι νόμοι παραγγέλλοντες τῷ πατρὶ τῷ σῷ σε ἐν μουσικῇ καὶ γυμναστικῇ παιδεύειν ;

  • Καλῶς, φαίην ἄν.


- Εἶεν· ἐπειδὴ δὲ ἐγένου τε καὶ ἐξετράφης καὶ ἐπαιδεύθης, ἔχοις ἂν εἰπεῖν πρῶτον μὲν ὡς οὐχὶ ἡμέτερος ἦσθα καὶ ἔκγονος καὶ δοῦλος αὐτός τε καὶ οἱ σοὶ πρόγονοι; καὶ εἰ τοῦθ ΄ οὕτως ἔχει, ἆρ ΄ ἐξ ἴσου οἴει εἶναι σοὶ τὸ δίκαιον καὶ ἡμῖν, καὶ ἅττ ΄ ἂν ἡμεῖς σε ἐπιχειρῶμεν ποιεῖν, καὶ σοὶ ταῦτα ἀντιποιεῖν οἴει δίκαιον εἶναι; Ἢ πρὸς μὲν ἄρα σοι τὸν πατέρα οὐκ ἐξ ἴσου ἦν τὸ δίκαιον καὶ πρὸς τὸν δεσπότην εἴ σοι ὢν ἐτύγχανεν, ὥστε ἅπερ πάσχοις ταῦτα καὶ ἀντιποιεῖν, οὔτε κακῶς ἀκούοντα ἀντιλέγειν οὔτε τυπτόμενον ἀντιτύπτειν οὔτε ἄλλα τοιαῦτα πολλά· πρὸς δὲ τὴν πατρίδα ἄρα καὶ τοὺς νόμους ἐξέσται σοι, ὥστε, ἐάν σε ἐπιχειρῶμεν ἡμεῖς ἀπολλύναι δίκαιον ἡγούμενοι εἶναι, καὶ σὺ δὲ ἡμᾶς τοὺς νόμους καὶ τὴν πατρίδα καθ ΄ ὅσον δύνασαι ἐπιχειρήσεις ἀνταπολλύναι, και φήσεις ταῦτα ποιῶν δίκαια πράττειν, ὁ τῇ ἀληθείᾳ τῆς ἀρετῆς ἐπιμελόμενος;

Ἢ οὕτως εἶ σοφὸς ὥστε λέληθέν σε ὅτι μητρός τε καὶ πατρὸς καὶ τῶν ἄλλων προγόνων ἁπάντων τιμιώτερόν ἐστιν πατρὶς καὶ σεμνότερον καὶ ἁγιώτερον καὶ ἐν μείζονι μοίρᾳ καὶ παρὰ θεοῖς καὶ παρ ΄ ἀνθρώποις τοῖς νοῦν ἔχουσι, καὶ σέβεσθαι δεῖ καὶ μᾶλλον ὑπείκειν καὶ θωπεύειν πατρίδα χαλεπαίνουσαν ἢ πατέρα, καὶ ἢ πείθειν ἢ ποιεῖν ἃ ἂν κελεύῃ καὶ πάσχειν ἐάν τι προστάττῃ παθεῖν ἡσυχίαν ἄγοντα, ἐάν τε τύπτεσθαι ἐάν τε δεῖσθαι, ἐάν τε εἰς πόλεμον ἄγῃ τρωθησόμενον ἢ ἀποθανούμενον, ποιητέον ταῦτα, καὶ τὸ δίκαιον οὕτως ἔχει, καὶ οὐχὶ ὑπεικτέον οὐδὲ ἀναχωρητέον οὐδὲ λειπτέον τὴν τάξιν, ἀλλὰ καὶ ἐν πολέμῳ καὶ ἐν δικαστηρίῳ καὶ πανταχοῦ ποιητέον ἃ ἄν κελεύῃ ἡ πόλις καὶ ἡ πατρίς ἢ πείθειν αὐτὴν ᾗ τὸ δίκαιον πέφυκε, βιάζεσθαι δὲ οὐχ ὅσιον οὔτε μητέρα οὔτε πατέρα, πολὺ δὲ τούτων ἔτι ἧττον τὴν πατρίδα;

- Τί φήσομεν πρὸς ταῦτα, ὦ Κρίτων; ἀληθῆ λέγειν τοὺς νόμους ἢ οὔ ;

ΚΡΙΤΩΝ

- Ἔμοιγε δοκεῖ.



Traduction de Luc Brisson, Garnier-Flammarion, 1997


1




5





10





15





20





25





30





35




39





44

SOCRATE

Mais supposons qu'alors les Lois répliquent

[Lois] : Socrate, est-ce là ce qui était convenu entre nous et toi? n'est-ce pas plutôt que tu tiendrais pour valables les jugements de la cité, quels qu'ils fussent?

SOCRATE Et si nous nous étonnions d'entendre ces paroles, elles pourraient bien nous dire :

[Lois] : Socrate, ne t'étonne pas de notre langage, réponds-­nous plutôt, puisque c'est ton habitude de procéder par questions et par réponses.

<TEXTE DE LA VERSION>










[Lois] : Bien, et une fois que tu as été mis au monde, que tu as été élevé et que tu as été éduqué, tu aurais le culot de prétendre que vous n'êtes pas toi, aussi bien que tes parents, à la fois nos rejetons et nos esclaves ! Et s'il en va bien ainsi, t'imagines-tu qu'il y ait entre toi et nous égalité de droits, t'imagines-tu que ce que nous pouvons entreprendre de te faire, tu puisses, toi, en toute justice entreprendre de nous le faire en retour? Quoi, tu serais égal en droit à ton père et à ton maître, si par hasard tu en avais un, et cela te permettrait de lui faire subir en retour ce qu'il t'aurait fait subir, de lui rendre injure pour injure, coup pour coup etc.. À l'égard de la cité et à l'égard des Lois, en revanche, cela te serait permis, de sorte que, si nous entreprenons de te faire périr parce que nous estimons que cela est juste, tu pourrais, toi, entreprendre, dans la mesure de tes moyens, de nous faire périr, nous, les Lois, et ta cité, et, en agissant de la sorte, tu pourrais dire que ce que tu fais est juste, toi qui as de la vertu un souci véritable ! Posséderais-tu un savoir qui te ferait oublier que, en regard d'une mère et d'un père et de la totalité des ancêtres, la patrie est chose plus honorable, plus vénérable, plus digne d'une sainte crainte et placée à un rang plus élevé", tant aux yeux des dieux qu'à ceux des hommes sensés; qu'il faut donc vénérer sa patrie, lui obéir et lui donner des marques de soumission plus qu'à un père, en l'ame­nant à changer d'idée ou en faisant ce qu'elle ordonne et en supportant sans se révolter le traitement qu'elle prescrit de subir, que ce soit d'être frappé, d'être enchaîné, d'aller au combat pour y être blessé ou pour y trouver la mort; oui, cela il faut le faire, car c'est en cela que réside la justice; et on ne doit ni se dérober, ni reculer, ni abandonner son poste, mais il faut, au combat, au tribunal, partout, ou bien faire ce qu'ordonne la cité, c'est-à-dire la patrie, ou bien l'amener à changer d'idée en lui montrant en quoi consiste la justice. N'est-ce pas au contraire une chose impie que de faire violence à une mère, à un père, et l'impiété serait-elle moindre lorsqu'il s'agit de la patrie?

SOCRATE : Que répliquerons-nous à ce discours, Criton? Les Lois ont-elles tort ou ont-elles raison?

CRITON

Pour ma part, je crois qu'elles ont raison.




QUESTIONS SUR LE TEXTE (50 points) : les réponses doivent être rédigées, et se référer précisément au texte grec (citations à faire en grec , et à retraduire précisément en français, si besoin est)


  1. à quoi sont comparées les Lois ? étudiez le système de comparaisons établi dans cet extrait, à partir notamment du vocabulaire employé par Platon.

  2. Quels aspects de la législation athénienne sont évoqués dans ce passage?

  3. Indiquez les étapes et les articulations de la démonstration des Lois.

  4. Commentez le vocabulaire religieux.

  5. Sur quels procédés repose l'éloquence des Lois, notamment lignes 27-39 (texte grec)







VERSION (50 points):


- Φέρε γάρ, τί ἐγκαλῶν ἡμῖν καὶ τῇ πόλει ἐπιχειρεῖς ἡμᾶς ἀπολλύναι ; Οὐ πρῶτον μέν σε ἐγεννήσαμεν ἡμεῖς καὶ δι ΄ ἡμῶν ἐλάμβανεν τὴν μητέρα σου ὁ πατὴρ καὶ ἐφύτευσέν σε ; Φράσον οὖν , τούτοις ἡμῶν τοῖς νόμοις τοῖς περὶ τοὺς γάμους μέμφῃ τι ὡς* οὐ καλῶς ἔχουσιν ;

- Οὐ μέμφομαι, φαίην ἄν.

- Ἀλλὰ τοῖς περὶ τὴν τοῦ γενομένου** τροφήν τε καὶ παιδείαν ἐν ᾗ καὶ σὺ ἐπαιδεύθης; ἢ οὐ καλῶς προσέταττον ἡμῶν οἱ ἐπὶ τούτῳ τεταγμένοι νόμοι παραγγέλλοντες τῷ πατρὶ τῷ σῷ σε ἐν μουσικῇ καὶ γυμναστικῇ παιδεύειν ;

  • Καλῶς, φαίην ἄν.


Notes :

τι ὡς* : " quelque chose, à savoir que…"

τοῦ γενομένου** : "de l'enfant…"



Retour en haut du texte