02 un inceste programmé
une femme capable de tout
An. XIV 2
Rumeurs d'inceste
Sénèque se sert d'Acté
Texte latin
Tradit Cluvius ardore retinendae Agrippinam potentiae eo usque provectam ut, medio diei, cum id temporis Nero per vinum et epulas incalesceret, offerret se saepius temulento comptam et incesto paratam; jamque lasciva oscula et praenuntias flagitii blanditias adnotantibus proximis, Senecam contra muliebris illecebras subsidium a femina petivisse, immissamque Acten libertam, quae, simul suo periculo et infamia Neronis anxia, deferret pervulgatum esse incestum, gloriante matre, nec toleraturos milites profani principis imperium. Fabius Rusticus non Agrippinae, sed Neroni cupitum id memorat ejusdemque libertae astu disjectum. Sed quae Cluvius, eadem ceteri quoque auctores prodidere, et fama huc inclinat, seu concepit animo tantum immanitatis Agrippina, seu credibilior novae libidinis meditatio in ea visa est quae, puellaribus annis, stuprum cum Lepido spe dominationis admiserat, pari cupidine usque ad libita Pallantis provoluta et exercita ad omne flagitium patrui nuptiis.
Vocabulaire
fréquences 1,2
annus,i : année
auctor,oris : auteur, conseiller, garant
ceteri,ae,a : tous les autres
exerceo,es,ere,cui, citum (ad+acc) : entraîner à
fama,ae : réputation
femina,ae : femme
huc : ici (mvt)
libido,inis : désir
miles,itis : soldat
par,paris : égal
paratus,a,um +D : prêt à, disposé à
peto,is,ere...ab+Abl : demander à qqn
propinquus,propior, proximus : proche, plus proche, très proche
retineo,es,ere... : retenir
seu...seu... : soit que...soit que
spes,spei : espoir
tantum+G : autant de
trado,is,ere,didi... : transmettre, livrer
videor,eris,eri... : sembler, paraître
vinum,i : vin
fréquences 3,4
admitto,is,ere... : laisser aller, admettre
concipio,is,ere... : concevoir
cupido,inis : désir, envie
defero,fers,ferre... : rapporter, révéler, présenter, emporter
liberta,ae : affranchie
medium,ii : milieu, centre, place publique
offero,fers,ferre... : offrir
osculum,i : le baiser
prodo,is,ere... : livrer, trahir
subsidium,ii : secours, soutien
tolero,as,are : supporter, endurer
veho,is,ere,xi,ctum : transporter
Ne pas apprendre
adnoto,as,are : remarquer, noter
ardor,oris: chaleur,ardeur,désir
blanditia,ae: flatterie,caresse
credibilis,is,e: croyable
dominatio,onis :pouvoir,emprise
epulae,arum : aliments, festin
flagitium,ii ::scandale,infamie, déshonneur
glorior,aris,ari...: se glorifier
illecebra,ae : séduction,attrait
immanitas,atis : cruauté
incalesco,is,ere :s’échauffer, s’éprendre
incestum,i: inceste
infamia,ae :mauvaise renommée, honte
lascivus,a,um: enjoué,lascif
meditatio,onis :réflexion
muliebris,is,e :de femme
pervulgo,as,are...: publier,répandre
profanus,a,um: profane, impie
provolvo,is,ere:jeter en avant
Grammaire : adjectif verbal; consécutives; participe et infinitif futurs; sens de l’adverbe au comparatif; id temporis; construction de idem. 5ème déclinaison
Traduction au plus près du texte :
XIV 2-
Cluvius rapporte qu’Agrippine fut entraînée par son ardeur à retenir le pouvoir absolu ( litt. son ardeur du pouvoir absolu devant être retenu) jusqu'à un tel point que, au milieu de la journée, comme à ce moment de la journée Néron était échauffé à cause du vin et des aliments, elle s’offrit assez souvent à lui qui était ivre, parée et prête à l’inceste (datif de but) ; et <Cl. rapporte > que, comme (abl abs) déjà le proche entourage (proximis) remarquait des baisers lascifs et les caresses annonciatrices du scandale, Sénèque, contre les séductions féminines, rechercha l’aide d’une femme (petere ab : demander à quelqu’un...), et que l’affranchie Acté fut envoyée, qui (quae + subj : 2 solutions : subj entraîné par l’infinitive -opinion de Cluvius ; ou nuance consécutive : si bien qu’elle...), préoccupée en même temps par son propre péril et par le déshonneur <encouru par> le prince, l’avertit que l’inceste avait été publié, parce que (abl.abs) sa mère s’en glorifié, et que les soldats ne supporteraient pas le pouvoir d’un prince souillé par le scandale (profani). Mais (asyndète) Fabius Rusticus mentionne non pas en ce qui concerne Agrippine (datif d’intérêt), mais en ce qui concerne Néron, que ce désir fut dissipé grâce à la ruse de la même affranchie. Pourtant, les choses que Cluvius <a transmises>, tous les autres auteurs aussi les ont dévoilées, et la rumeur publique penche de ce côté, soit qu’Agrippine ait conçu dans son cœur un si grand degré de monstruosité, soit que la préméditation d’une débauche inouïe (novae) parût plus crédible chez une femme qui (in ea quae), pendant ses années de jeunesse, avait accepté le déshonneur avec Lépide (=de se déshonorer avec Lépide) par espoir du pouvoir suprême, < qui> fut abaissée par une débauche équivalente jusqu’aux caprices de Pallas, et entraînée à toute infamie par son mariage avec son oncle.
Traduction Goelzer Ed Budé, Paris, 1925
Cluvius rapporte que dans son ardeur à maintenir sa puissance, Agrippine en vint à ce point qu'au milieu de la journée, à l'heure où Néron se sentait échauffé par le vin et la chère, elle s'offrit plusieurs fois au jeune homme en état d'ivresse soigneusement parée et prête à l'inceste; déjà des baisers lascifs et des caresses, préludes du crime, attiraient l'attention de leur entourage, lorsque Sénèque, cherchant contre les séductions d'une femme le secours d'une autre femme, dépêcha à Néron l'affranchie Acté. Celle-ci, inquiète à la fois pour elle-même et pour l'honneur du prince, l'avertit que le bruit de l'inceste s'était propagé, que sa mère s'en faisait gloire, mais que l'armée ne supporterait pas un empereur souillé de ce crime. Selon Fabius Rusticus, ce ne fut point Agrippine, mais Néron qui conçut ce désir, et il en fut détourné par l'adresse de la même affranchie. Mais Cluvius et les auteurs qui suivent sa version ont pour eux le bruit public, soit qu'un projet si monstrueux ait été conçu par Agrippine, soit que la préméditation d'une débauche raffinée paraisse plus vraisemblable de la part d'une femme qui, jeune mariée, s'était donnée à Lépidus par ambition de régner, que la même passion avait faite plus tard la chose d'un Pallas, et que son mariage avec son oncle avait rompue à toute espèce d'infamie.